Faire reconnaitre la petite hydroélectricité d’intérêt public majeur : participez à la consultation publique

Publié le 6 novembre 2023 | Actualités

Énergie
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Un projet de décret  actuellement soumis à la consultation publique définit les conditions auxquelles un nouveau projet hydroélectrique sera automatiquement considéré comme répondant à une « raison impérative d’intérêt public majeur » (RIIPM).

Seuil à 3 MW : un non sens énergétique

Issu de la loi d’accélération des énergies renouvelables (article 19), le décret fixant les conditions de la reconnaissance impérative d’intérêt public majeur des nouveaux projets hydroélectriques est actuellement en cours de consultation publique (du 30 octobre au 24 novembre 2023)

Ce décret prévoit que seuls les projets hydroélectriques d’une puissance supérieure à 3 MW pourront bénéficier de la RIIPM et 1 MW dans les zones non interconnectées (ZNI). Incompréhensible et injustifié, ce seuil de 3 MW écarte les projets de plus petite taille qui représentent pourtant la majorité du potentiel de développement hydroélectrique.

Sur la base des amendements que nous avons portés avec le Syndicat des Energies Renouvelables (SER) et l’Union Française de l’Electricité (UFE), le Conseil Supérieur de l’Energie (CSE) s’est prononcé mi octobre en faveur d’un seuil significativement plus bas, à 150 kW, avis que le Gouvernement n’a pas souhaité suivre.

Rappelons que justifier de l’intérêt public majeur d’un projet n’est que l’une des trois conditions cumulatives à remplir pour obtenir une dérogation à l’interdiction de destruction ou d’altération d’espèces protégées.

  1.  qu’il n’existe pas d’autre solution alternative de moindre impact ;
  2.  que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle ;
  3. qu’elle soit justifiée par une RIIPM.

Ainsi, les deux premières conditions restent applicables.
La RIIPM présente l’intérêt de sécuriser les plus petits projets sur le plan juridique, tant la démonstration de leur intérêt public majeur est difficile à faire et est appréciée de manière aléatoire par les juges dans les contentieux portés par certaines associations.
Elle ne constitue aucunement un blanc-seing pour l’obtention de l’autorisation et n’affaiblit pas la protection de la biodiversité. Par contre, ne pas bénéficier de cette présomption rendra encore plus difficile la démonstration d’un intérêt public majeur.

 

Conjointement avec le Syndicat des Energies Renouvelable, l’Union Française de l’Electricité et les associations d’élus, France Hydro Electricité a tenté en vain de convaincre la Première Ministre, la Ministre de la transition énergétique et le Ministre de la transition écologique du bien fondé de nos arguments . Incohérent et injustifié, ce seuil de 3 MW entraverait le développement de projets pourtant essentiels à la transition énergétique des territoires

Participez à la consultation publique (jusqu'au 24 novembre)

A défaut de pouvoir s’affranchir d’un seuil, France Hydro Electricité avait proposé que les projets hydroélectriques puissent bénéficier de la reconnaissance impérative d’intérêt public majeur à partir de 150 kW. Seuil en faveur duquel le Conseil Supérieur de l’Energie (CSE) s’est prononcé à une très large majorité.

France Hydro Electricité invite ses adhérents, la profession dans son ensemble, ainsi que les élus, à participer à la consultation publique qui se déroule en ligne jusqu’au 24 novembre en déposant un commentaire visant à défendre un seuil le plus bas possible pour permettre à la petite hydroélectricité de bénéficier de la RIIPM.

 

Nous mettons ci-dessous à votre disposition des arguments dont vous pouvez librement vous inspirer dans votre commentaire, en réponse à la consultation publique (merci de ne pas reprendre le pavé de texte tel quel dans vos réponses à la consultation) :

  • Il est sans fondement de considérer qu’un projet d’une puissance supérieure à 3 MW serait davantage d’intérêt public majeur qu’un projet de 400 kW. Aucun argument objectif ne peut être avancé dans ce sens.
  • L’essentiel du potentiel hydroélectrique porte sur des installations de puissance inférieure à  3 MW : ce sont ces petits projets qui ont le plus de difficultés à démontrer leur intérêt public majeur. Il serait regrettable d’écarter ce vecteur de la transition énergétique en les rendant plus difficiles encore.
  • Il est incohérent de lancer des appels d’offres à partir de 1 MW pour la petite hydro afin d’atteindre les objectifs PPE et de ne reconnaître l’intérêt public majeur de ces projets qu’à partir de 3 MW.
  • La Riipm n’allège pas les garanties prévues par la procédure d’instruction pour préserver la biodiversité. Elle ne fait que faciliter la preuve de l’une des trois conditions cumulatives qu’un porteur de projet doit réunir pour obtenir une dérogation à l’interdiction de destruction ou de simple altération d’espèces protégées.
  • Tous les projets, petits ou grands, n’échappent pas à l’instruction environnementale et lorsqu’il est nécessaire d’obtenir une dérogation « espèces protégées », ils doivent tous respecter les deux autres conditions de l’article L. 411-2 du code de l’environnement (absence de solution alternative satisfaisante et absence de nuisance pour le maintien dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées, dans leur aire de répartition naturelle).
  • Compte tenu des difficultés et du retard français dans le développement des énergies renouvelables, de la hausse programmée des besoins en usages électriques et du fait que le pays semble devoir être durablement importateur d’électricité, RTE dans son bilan prévisionnel 2035 affirme que tout électron renouvelable additionnel sera indispensable. La France devrait compter sur tous les gisements d’électricité, quelles que soient leurs tailles. La somme des puissances de ces projets de petites installations représente plus d’un TWh ce qui est un intérêt public majeur. 
  • Les petites installations ont par ailleurs l’avantage d’une meilleure intégration dans l’environnement territorial et par là une meilleure acceptabilité, critère qui sera clé dans l’efficience du développement des énergies renouvelables  dans les années à venir.
  • Les installations hydroélectriques, quelles que soient leurs tailles, forment un continuum d’installations qui rendent des services à la maille locale aux réseaux et aux territoires sur lesquels elles sont implantées. Une petite centrale installée dans une vallée pourra couvrir 100% de la demande en énergie et 50 à 100% des besoins en flexibilité pour mieux accueillir les énergies renouvelables variables. L’intérêt public majeur doit se décliner à la maille des territoires où les installations concernées sont installées. Les demandes techniques d’Enedis adressées aux petites centrales pour ajuster la tension (le réactif) témoignent chaque jour de leur intérêt pour le système électrique.
  • Quelle que soit la puissance, l’hydroélectricité va être de plus en plus un facteur clé pour la stabilité du système électrique et la gestion des réseaux locaux. Sans l’hydroélectricité produite par des centrales de toutes tailles et réparties sur le territoire, la transition énergétique avec plus de renouvelables variables sera difficile à mettre en œuvre car elle exige le développement massif de moyens de flexibilité (étude Compass Lexecon 2020). L’intérêt public majeur du système électrique est en jeu.

 

France Hydro Electricité appelle à sortir de ces touches de simplifications incohérentes, sans vision d’ensemble, qui feignent de concilier ce qui est déjà une réalité sur le terrain, avec des installations d’énergies renouvelables qui gèrent depuis plus d’un siècle le multiusage des cours d’eau et continue d’innover pour s’insérer toujours mieux dans son environnement auquel elle rend de nombreux services qu’il serait juste de ne pas oublier.

Mots clefs : RIIPM, raison impérative intérêt public majeur,